
Note de lecture : Pour enseigner le vocabulaire à l’école maternelle
Pourquoi enseigner explicitement le vocabulaire en maternelle ?
- Le vocabulaire est un facteur clé de la réussite scolaire et un prédicteur fort de la capacité future à lire et comprendre des textes.
- Les écarts de vocabulaire entre élèves sont importants dès la petite section, liés aux différences d’exposition au langage dans l’environnement familial.
- L’apprentissage du vocabulaire ne peut pas se faire uniquement par exposition : il nécessite un enseignement structuré, explicite et progressif.
Principes pédagogiques pour un enseignement efficace
Choix des mots et structuration
Pourquoi est-il important de bien choisir les mots ?
- Un enfant doit connaître au moins 2 500 mots en grande section pour entrer sereinement dans l’apprentissage de la lecture.
- Les écarts de vocabulaire entre élèves dès la maternelle peuvent avoir un impact durable sur leur réussite scolaire.
- Il est donc crucial de choisir des mots utiles et structurés, plutôt que de simplement exposer les enfants à un grand nombre de mots sans organisation.
Quels types de mots choisir ?
Mots usuels du quotidien : objets, actions et émotions courantes (ex. : manteau, courir, content).
Mots spécifiques aux projets de classe : vocabulaire lié aux thèmes étudiés (ex. : animaux marins, outils du jardinier).
Mots abstraits : notions plus complexes pour structurer la pensée (ex. : hier, plus tard, grand, plus grand, cause-conséquence).
Mots de liaison et de structuration : connecteurs logiques et temporels (ex. : parce que, d’abord, ensuite, mais).
Comment organiser les mots pour favoriser la mémorisation ?
Regroupement en réseaux sémantiques :
- Plutôt que d’apprendre des mots isolés, les organiser par thèmes facilite leur mémorisation.
Exemple : le champ lexical de la forêt → arbre, feuille, gland, écureuil, mousse, champignon.
Mise en lien avec des expériences concrètes :
- Associer le mot à une expérience vécue aide à sa compréhension et à sa réutilisation.
Exemple : apprendre le mot « moudre » en utilisant un moulin à café en classe.
Travail sur les liens entre mots :
- Introduire des synonymes et antonymes pour enrichir le vocabulaire.
Exemple : heureux / joyeux / content | rapide / lent | ouvrir / fermer.
Multiplication des contextes d’apprentissage
Pourquoi ?
- Un mot entendu une seule fois est vite oublié.
- Pour qu’un enfant s’approprie réellement un mot, il doit l’entendre plusieurs fois dans des contextes différentset l’utiliser activement.
Comment varier les situations d’apprentissage ?
Rituels quotidiens :
- Le vocabulaire doit être intégré dans les moments clés de la journée.
Exemple : L’appel (présent/absent), la météo (il fait froid/chaud), les consignes (prends, range, montre-moi).
Lecture et récits :
- Lire des albums jeunesse, des contes et des documentaires pour exposer les élèves à des mots variés.
Exemple : Lecture de « Boucle d’or et les trois ours » pour travailler les notions de taille (petit, moyen, grand).
Jeux et manipulations :
- Associer les mots à des activités ludiques pour mieux les ancrer.
Exemple : Utiliser un loto des émotions (content, triste, surpris) ou un jeu de kim pour faire deviner un objet caché.
Chants et comptines :
- Les chansons aident à fixer du vocabulaire de façon naturelle et rythmée.
Exemple : La chanson « Promenons-nous dans les bois » pour les mots liés aux vêtements et à la forêt.
Exploration sensorielle :
- Associer des mots à des expériences sensorielles (goût, toucher, vue, ouïe, odorat).
Exemple : Découvrir des épices pour apprendre le vocabulaire des saveurs (sucré, salé, épicé, amer).
Interaction et verbalisation
Pourquoi ?
- Un enfant apprend un mot lorsqu’il le réutilise en contexte.
- L’enseignant doit donc inciter les élèves à parler, à reformuler et à expliquer avec leurs propres mots.
Stratégies pour favoriser la verbalisation
Reformulation et étayage :
- Si un enfant dit « Le chien il saute », l’enseignant peut reformuler :
« Oui, le chien bondit par-dessus la barrière ! » (ajout d’un verbe plus précis).
Questionner pour approfondir :
- Poser des questions ouvertes pour faire parler l’enfant et l’amener à préciser.
Exemple : « Comment sais-tu qu’il fait froid ? » → « Parce que j’ai des frissons et je vois de la fumée quand je parle. »
Débats et discussions :
- Organiser des temps de parole pour que les enfants expliquent, décrivent, argumentent.
Exemple : « Décris ton jouet préféré. »
Histoires racontées par les enfants :
- Encourager les élèves à raconter un événement en utilisant les nouveaux mots appris.
Exemple : « Raconte-moi ce que tu as fait ce week-end. »
Progression des apprentissages
- Petite section (PS) : Apprentissage par le jeu, association mot-objet, rituels de langage, comptines.
- Moyenne section (MS) : Développement du vocabulaire lié aux actions et aux émotions, premières catégorisations.
- Grande section (GS) : Acquisition d’un vocabulaire plus précis, structuration en champs lexicaux, verbalisation d’événements complexes.
Mémorisation et suivi des progrès
Pourquoi ?
- L’exposition passive ne suffit pas : les enfants oublient rapidement s’il n’y a pas de consolidation régulière.
- Un mot doit être réactivé au moins 6 à 10 fois dans différents contextes pour être mémorisé durablement.
Stratégies pour aider à la mémorisation
Répétition espacée et variée :
- Réutiliser les mots après quelques jours, quelques semaines, et dans des situations différentes.
Exemple : Le mot « flotte » introduit lors d’une expérience avec de l’eau peut être revu lors d’une lecture sur les bateaux.
Supports visuels et affichages :
- Utiliser des imagiers, boîtes à mots, cartes illustrées pour aider à fixer le vocabulaire.
Exemple : Une « boîte à mots » où chaque élève peut placer un mot appris et le ressortir pour l’expliquer aux autres.
Utilisation dans des productions écrites (en GS) :
- En grande section, les élèves peuvent associer mots et dessins pour mieux retenir les nouveaux termes.
Exemple : Un carnet de mots illustrés où chaque enfant colle une image et écrit le mot correspondant.
Évaluation et suivi des progrès :
- Observer si les enfants réutilisent spontanément les mots appris.
- Créer des moments où les élèves expliquent eux-mêmes les mots à leurs camarades.
Conclusion
L’enseignement du vocabulaire en maternelle repose sur une pédagogie active, où les élèves découvrent, manipulent et réutilisent les mots dans des contextes variés. L’enseignant joue un rôle essentiel dans l’étayage, la structuration et la régularité des apprentissages pour assurer un développement lexical solide dès le plus jeune âge.